Résumé:
Considérant les spécificités éco-physiographiques de chaque terroir d'une part et considérant les
conditions édaphiques et climatiques propres (exigences culturales), optimales exigées par chaque
culture pour un développement végétatif normal d'autre part, nous nous sommes assigné comme
principal objectif dans cette étude, celui de déterminer ces exigences et ce pour chacune des deux
cultures céréalières, à variété locale, blé dur (Triticum durum Desf var. Mohamed Ben Bachir) et
orge (Hordeum vulgare L. var. Saida).
Notre objectif qui s'inscrit dans le cadre d'une problématique économique mondiale donc par
principe universelle, consiste dans notre cas, précis d'étude, à lever le voile sur le pourquoi et le
comment d'une situation agro-socio-économique locale et régionale.
La réponse qui sera donnée par le biais du recensement des rendements agricoles ne peut
que mettre en évidence le niveau des relations éco-physiographiques entre la station et les
cultures. Ce niveau qui est exprimé en terme de classes d'aptitudes (des terres) met en exergue le
degré de contrainte des caractéristiques physiques et physico-chimiques. Ce qui permet d'aborder
et d'entreprendre avec plus de rigueur scientifique et de facilité technique toutes les actions
d'aménagements, possibles financièrement.
Les résultats obtenus peuvent par ailleurs faire l'objet d'initiative ou décision d’extrapolation
vers d’autres stations qui présenteraient des similitudes et des analogies environnementales (écophysiographiques).
Le choix de notre zone d’étude, comme tout choix d'ailleurs, se justifie par un ensemble de
caractères physico-géographiques, climatiques et biologiques.
Pour nous ce sont:
-i) son emplacement dans un cadre géographique au sein duquel se délimitent des plaines et
des dépressions salines inondables;
-ii) son type de climat semi-aride frais à froid, la caractérisant comme frange de transition
entre un Nord plus arrosé et un Sud plus sec;
Par compromissions entre ces deux points, cette région est alors:
-iii) favorable à un peuplement végétal relativement spécifique, moins diversifié et un
développement végétatif prolongé et contrôlé.
Cette zone étant vierge du point de vue étude pédologique, notre initiative première dans le
cadre de notre travail aura consisté à établir une carte des sols avec délimitation des ensembles
morpho-pédologiques qui la caractérisent. Cette région est dominée par des sols calcimagnésiques
répartis plus au centre mais sont rencontrés un peu partout dans la zone d'étude. Viennent ensuite
les sols halomorphes au centre Nord et au Nord-Est, suivis des sols peu évolués puis par les sols
vertiques au centre sud.
Le protocole ainsi que le matériel d'étude et de suivi considère, outre les variétés de
cultures sus-citées, un ensemble de stations constituées représentées par des parcelles d'essais,
représentatives des ensembles éco-céréaliers et des plaines céréalières représentées par des unités
pédologiques distinctes.
Nous avons eu à considérer 33 unités de sols dans la plaine de Remila, 12 unités de sols dans la
plaine de Berriche, deux parcelles d’essais à Kais, deux parcelles d'essais à Berriche, une parcelle
à Timgad , une autre à Hamla et enfin deux parcelles à Ain Skhouna.
Le recensement des données touche plus particulièrement les rendements des cultures (toutes
unités de sols et toutes parcelles d'essais confondues) ainsi que les disponibilités en eau pluviale
et en température durant les stades végétatifs des cultures durant leur développement dans les
parcelles d'essais.
Dans les plaines céréalières de Berriche et de Rémila, le suivi des cultures à travers leur
rendement en rapport avec les pluies moyennes annuelles, s'est échelonné sur une période de
cinq années agricoles (1991/92 à1995/96). Pour les parcelles d'essais, il aura été de deux années
agricoles, consistant à étudier les rendements en rapport avec les disponibilités hydriques et
thermiques durant les cycles végétatifs des cultures.
L'interprétation des résultats expérimentaux s'est faite en utilisant la méthode classique ainsi
que deux des méthodes statistiques : "analyse de la variance" et "analyse multidimensionnelle".
Entre autres méthodes d'évaluation des terres nous avons retenu la méthode FAO, d’évaluation
des terres. Celle-ci étant largement employée, il lui est reconnu d'avoir donné des résultats
satisfaisants.
La comparaison dans un premier temps, entre: 1) les exigences culturales, exigences que nous
avons pu établir sur la base des résultats expérimentaux d'une part, et 2) les caractéristiques de sols
et de climat des plaines céréalières de Remila et Berriche et des stations d’essais de Hamla, Timgad,
Ain Skhouna, Kais et Berriche, nous a permis de dégager et de définir les aptitudes culturales
correspondantes et la mise en exergue des caractéristiques limitant le développement des cultures.
La synthèse des résultats met en exergue une zone d’étude avec des aptitudes pour le blé dur et
l’orge, qui sont dans leur ensemble moyennes à modérées. La partie centrale, plus dépressionnaire
et plus salifère présente de meilleures aptitudes pour l’orge. Contrairement aux terres du Nord-Est
(région de Oum El Bouagui, Berriche et Ain Beida) et du Sud –Ouest (région de Batna) qui sont
fortement marginales pour les céréales. Cette partie centrale qui est représentée par la plaine de
Remila prolongée à l’Est par le périmètre de Kais et les terres environnantes à Khenchela, est dans
son ensemble nettement plus favorable aux cultures. Les aptitudes dégagées sont partagées entre
les trois définitions: bonnes, moyennes et marginales, des classes d'aptitudes des terres.
Le climat apparaît dans notre zone d’étude comme le facteur le plus déterminant et le
plus contraignant, marginalisant dans son ensemble le développement des céréales. Les limites
minimales pluviales durant le cycle végétatif sont de 150mm. En dessous de cette quantité pluviale,
la plante subit un fort stress hydrique et ne peut continuer son cycle de développement comme ce
fut le cas à Timgad durant l’année agricole 1994/95. Les meilleurs rendements sont obtenus pour
une moyenne pluviale de plus de 250mm durant le cycle végétatif. Ce fut le cas de l’année agricole
la plus pluvieuse (1995/96), durant laquelle nous avons enregistré de meilleurs rendements pur des
hauteurs pluviales au-delà de 630mm. Dans l’ensemble des sols de la zone d’étude, les rendements
sont moyens.
Partant de là, et considérant la similitude entre les rendements et les classes d’aptitudes,
d’une part et les groupes homogènes dégagés par l’analyse de la variance, nous avons pu ressortir
et définir quatre niveaux potentiels qui caractérisent notre zone d’étude. Les écarts entre les
rendements qui les définissent sont assez substantiels et mettent en évidence l’importance, la malléabilité et la souplesse ainsi que la rusticité des deux variétés céréalières locales étudiées.
Ainsi pour des rendements moyens inférieur à 5 qt/ha, les terres sont inaptes avec des contraintes
majeures et au-delà de 25 qt/ha, elles sont aptes avec des contraintes mineures.
De manière générale, toute procédure appliquée par l’évaluateur arrive à des résultats sur les
degrés de convenance (suitability) des terres envers les cultures choisies ce qui permet à l'utilisateur
des terres agricoles d'avoir des idées plus claires allant dans le sens d'une option et d'un choix de
cultures ou de mode de développement plus avisé compte tenu de calculs économiques exprimées
en termes de rendements ou en termes de bénéfices.
L'analyse classique des données climatiques de longues durée concernant 22 postes
pluviométriques de la zone d'étude d'une part et ce qui s'en est déduit de l’analyse statistique
(analyse de la variance et analyse multidimensionnelle) des données: 1) climatiques récentes; 2)
des rendements et; 3) des données de sols de l’ensemble des stations, nous a permis de délimiter
trois zones agro-climatiques ou zones agro-pluviométriques spécifiques pour le blé dur et l’orge
dans cette région Sud des Hautes Plaines Constantinoises.
Cette spécificité agro-climatique, qu’elle soit micro-zonale ou macro-zonale a été validée par
les résultats qui se dégagent de la comparaison entre les classes d’une part et les rendements des
cultures dans plusieurs unités de sols ou stations d'autre part.