Résumé:
Un diagnostic à l’échelle wilayal fait ressortir que la wilaya de Tizi Ouzou est très impactée par
les feux de forêts, avec un cumul record de 2 685 feux, ayant détruit une superficie forestière
totale de 63 617 ha durant la période 1986-2005.
L’analyse statistique exploratoire des feux passés montre une temporalité marquée des feux,
puisqu’ils surviennent en majorité en août et surtout dans le créneau horaire de 10-18 h.
L’évolution annuelle révèle la versatilité des feux de forêts et surtout deux années
catastrophiques, 1993 et 1994. Sur le plan spatial, il ressort que le phénomène des feux de forêts
est bien circonscrit, quant à la gravité et à la récurrence des feux, dans une dizaine de communes
mitoyennes de la zone littorale et sublittorale montagneuse de la portion orientale la plus boisée
de la région étudiée. Cette analyse fait ressortir de même que certaines grandes forêts domaniales
et le reboisement industriel sont les plus gravement atteints par les feux (zones rouges
prioritaires). Enfin, la formation forestière la plus touchée par le feu est assurément la « subéraie
pure », prédominante dans la région étudiée, mais également les maquis et les plantations.
L’examen attentif des grands feux (# 100 ha), 3,5 % de la fréquence totale, mais, près de 54 % de
la surface incendiée en 20 ans, permet de voir que ce sont les mêmes communes et les mêmes
forêts qui enregistrent la majorité des grands feux. Ensuite, une évaluation du risque fréquentiel
(IRF) et du risque surfacique (RMA) a été effectuée et restituée sous forme cartographique, à
l’échelle des unités de gestion territoriale et de gestion forestière, afin de tirer des enseignements
pratiques des feux passés. Une estimation d’un risque global, intégrant le peuplement végétal, a
été réalisée après l’identification sur le terrain des « types de combustibles » au niveau des 7
principales forêts domaniales de la wilaya étudiée, suivant la méthode espagnole. Les résultats
obtenus s’avèrent instructifs et corroborent la pertinence des indices de risque IRF et RMA.
L’étude des causes d’incendies a été abordée via une synthèse comparative, au niveau de 5
wilayas de l’Algérie littorale centrale. Les résultats acquis s’avèrent très insuffisants (99 % de
causes inconnues à Tizi Ouzou). Par une approche probabiliste, nous avons tenté de cerner les
origines des feux en croisant les données pyrologiques avec des indicateurs d’ordre
socio-économique (facteur démographique, cheptel, etc.). Les résultats établis à l’aide d’une
analyse multivariée révèlent que les activités sylvopastorales (pâturage en forêt, apiculture) et le
facteur pénétration des massifs forestiers, par un réseau routier public très dense, sont les
principales variables explicatives quant aux causes d’incendies de forêts les plus fréquentes. De
plus, le haut potentiel forestier de la région est aussi un facteur décisif, compte tenu de la forte
proportionnalité entre les variables feu et surface forestière ou taux de boisement. Un autre volet
a été abordé, il s’agit de l’efficience de l’infrastructure de base de PFCI. Par le biais d’une
analyse multivariée, il apparaît que celle-ci est non seulement inefficace, mais même aggravante
pour les incendies, que les pare-feux et surtout les pistes forestières soient entretenus ou non.
Enfin, une enquête socio-économique a été menée auprès des populations rurales (960 riverains
interviewés) de 189 villages, répartis au niveau de 15 communes forestières, littorales et
sublittorales. Ces populations demeurent tributaires des ressources naturelles des forêts
avoisinantes et sont conscientes de la gravité des feux de forêts. Ce panel a surtout permis de
constater de grandes divergences entre les données de l’administration forestière et la réalité du
terrain perçue par les populations riveraines des forêts sur plusieurs aspects (alerte, intervention
et plus spécialement causes des feux).